Transformer les déchets textiles en produits papetiers : une innovation québécoise à l’avant-garde de l’économie circulaire
Chaque année, des millions de tonnes de déchets textiles finissent dans les sites d’enfouissement, malgré leur potentiel cellulosique largement inexploité. Dans notre plus récente étude publiée dans Cellulose, notre équipe d’Innofibre, en collaboration avec plusieurs partenaires industriels, démontre qu’il est possible de transformer ces résidus textiles en pâtes papetières fonctionnelles, ouvrant ainsi la voie à de nouveaux produits moulés.
Des vêtements à la pâte moulée
Notre recherche a porté sur le recyclage de retailles de coton fournies par l’entreprise montréalaise Atelier b. En utilisant un défibreur de type Valley, nous avons réussi à produire une pâte fibreuse à partir de ces textiles. En modulant le temps de raffinage, nous avons étudié l’impact sur les propriétés mécaniques et physiques du papier produit.
Un temps de raffinage optimal a permis d’atteindre un équilibre entre allongement, résistance à l’éclatement et à la déchirure, tout en assurant une densité et une perméabilité à l’air compatibles avec les standards industriels. Un raffinage excessif, toutefois, entraîne un raccourcissement trop important des fibres et une production excessive de fines, ce qui nuit à la performance du matériau.
Figure 1. Raffinage de type Valley avec retailles textiles.
Un défi inattendu : les pigments
L’un des enjeux importants observés concerne la lixiviation des colorants textiles durant le raffinage. Ces pigments libérés dans les eaux de procédé posent un défi environnemental. Nous avons testé des agents de fixation utilisés en papeterie (FennoFixTM et FennoPolTM), qui ont significativement réduit la concentration de colorant dans l’eau blanche, une piste prometteuse pour un traitement plus écologique.
Figure 2. Décoloration des eaux blanches sans (a) et avec (b) FennoFixTM et FennoPolTM
Une application concrète : le cintre moulé
Afin de démontrer la faisabilité industrielle, nous avons conçu un moule 3D pour produire des cintres en pâte moulée à partir de notre pâte textile raffinée. Le résultat? Un produit rigide, léger, entièrement en textile recyclé, prêt à remplacer le plastique dans les environnements commerciaux.
Figure 3. Cintres moulés issus de résidus textiles, propriété d’Atelier b.
Vers une papeterie circulaire
Cette étude ouvre de nouvelles avenues pour l’industrie papetière québécoise. En intégrant les résidus textiles — une ressource abondante et sous-exploitée — dans les procédés de fabrication de pâte, on répond à la fois à la pénurie de matières premières forestières et aux exigences environnementales croissantes. L’approche s’inscrit pleinement dans une logique d’économie circulaire et de valorisation des flux de déchets locaux.
Pour en savoir plus
Consultez notre article complet publié dans Cellulose :
https://doi.org/10.1007/s10570-025-06619-3
Remerciements
Cette recherche a été rendue possible grâce au soutien du CRSNG (subvention CARD2-566875), à Atelier b pour les retailles textiles et le développement des cintres, et à Kemira pour les additifs chimiques.
* Source de l'image principale : https://www.quebeccirculaire.org/initiative/h/eviter-l-enfouissement-des-textiles-cellulosiques-par-le-design-chez-atelier-b.html
La mission d'Innofibre
« Contribuer au positionnement technologique et au développement durable de l’industrie papetière et du bioraffinage au Québec, en soutenant l’innovation et la diversification des produits issus de la biomasse et en adaptant les technologies papetières. »
Éric Denoes
Chercheur, Innofibre
