Plantation d'arbres, feux de forêt et comptabilisation du carbone

(Archives LMP)

Martin Fairbank
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Selon le projet Global Carbon Budget, il y a eu 40 milliards de tonnes d'émissions anthropiques de CO2 dans le monde en 2023.

Environ 10 milliards ont été absorbées par les océans, ce qui entraîne leur acidification, 12 milliards ont été absorbées par les forêts pour devenir de la nouvelle biomasse, et le reste est demeuré dans l'atmosphère, augmentant le réchauffement global. Cela montre à quel point les forêts sont importantes dans la lutte contre le réchauffement global et l'acidification des océans.

En 2023, des chiffres importants ont fait la une des journaux canadiens : 18,5 millions d'hectares de forêts canadiennes ont brûlé, et le gouvernement fédéral a fait état de progrès dans le programme Deux milliards d'arbres (2BT). Mais comment comparer quantitativement les hectares brûlés de forêt et le nombre d'arbres plantés aux émissions fossiles ? Après quelques recherches, j'ai rassemblé quelques chiffres pour obtenir un ordre de grandeur des estimations de ces quantités à des fins de comparaison, exprimées en tonnes de carbone (sur une échelle logarithmique). Les barres vertes représentent le stockage du carbone et les rouges représentent les émissions (converties de tonnes de CO2e en tonnes de carbone pour faciliter la comparaison).

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La quantité totale de carbone stockée dans les forêts du monde est estimée à 861 milliards de tonnes, dont environ 9,0 % au Canada, à 78 milliards de tonnes. Le Conseil canadien des ministres des forêts (CCMF) estime qu'un hectare de forêt canadienne mature absorbe 6,4 tonnes de CO2 par an, stockant ainsi 12/44 × 6,4 = 1,7 tonne C/ha. En multipliant par la superficie des forêts du Canada, 367 millions d'hectares, cela donne 641 millions de tonnes d'absorption de carbone, donc en termes comptables, c'est un taux de croissance annuel d'environ 0,8 %.

Pour les deux milliards d'arbres que le Canada s'est engagé à planter au cours des dix prochaines années et si nous supposons une densité de 1 500 arbres/ha (un ordre de grandeur raisonnable comme estimation), nous obtenons 1,3 million d'hectares de boisement, et à 1,7 tonne C/ha à maturité, les 2BT absorbent 2,3 millions de tonnes de carbone par an, augmentant la capacité d'absorption existante de la forêt canadienne de seulement 0,36 %. Mais bien sûr, il faudra plusieurs décennies pour que les 2BT atteignent leur maturité! Pour mettre les 2BT en perspective, le secteur forestier canadien replante déjà toutes les zones qu'il récolte, plantant environ 600 millions de semis chaque année; sur dix ans, cela représente six milliards d'arbres !

Examinons maintenant le côté émissions de l'histoire. Les émissions de GES du Canada en 2021 (l'année la plus récente des résultats officiels) étaient de 670 millions de tonnes de CO2e. Cela équivaut à 183 millions de tonnes de carbone. En termes comptables, cela représente une perte de 0,23 % par rapport à la quantité de carbone dans la banque de carbone forestière du Canada, ce qui ne semble pas trop mauvais par rapport au chiffre précédent de 0,8 % de taux de croissance annuel.

Malheureusement, ce n'est qu'une partie de l'histoire et représente une situation idéale où les forêts sont en bonne santé. Ce n'est pas le cas, en raison de l'augmentation des dommages causés par les insectes et les incendies de forêt qui sont une conséquence du changement climatique. On estime que la saison record des feux de forêt canadiens de 2023 a détruit 18,5 millions d'hectares de forêt, entraînant une émission de 480 millions de tonnes de carbone, soit 1,76 milliard de tonnes de CO2e. Vu en termes comptables, le carbone stocké dans les forêts du Canada a diminué de 0,48/78 = 0,62 %, soit plus de 2½ fois les émissions de carbone canadiennes de 2021 du paragraphe précédent !

MF 7mai24 2La superficie des forêts perturbées par les insectes, tels que la tordeuse des bourgeons de l'épinette, la tordeuse des bourgeons du pin gris, le dendroctone du pin ponderosa, la teigne spongieuse et le dendroctone de l'épinette, a considérablement augmenté au cours des 30 dernières années, en partie à cause d'un taux de survie plus élevé des insectes pendant les hivers plus chauds. Comme le montre ce tableau, ces dernières années, le nombre d'hectares touchés par les insectes a été beaucoup plus important que la superficie brûlée par les incendies de forêt. Les arbres tués par les insectes entraînent une perte de stocks de carbone et rendent également les forêts plus vulnérables aux incendies de forêt, mais estimer les résultats en termes comptables est très complexe. Le Service canadien des forêts (SCF) dispose d'une équipe dédiée à la construction et à la maintenance du modèle du bilan carbone du secteur forestier canadien (CBM-CFS3), un modèle très détaillé qui prend en compte des données granulaires telles que les essences d'arbres, les taux de croissance selon l'emplacement, les effets de la gestion forestière, les émissions de matière organique morte et les perturbations telles que les incendies et les infestations d'insectes. Le modèle est adapté en continu à l'aide de données de surveillance des forêts et de télédétection.

Dans cette tentative de représenter le compte du carbone forestier du Canada en termes simples, j'ai choisi des chiffres provenant de sources fiables et j'ai utilisé des hypothèses raisonnables. Pour plus de détails, je vous encourage à lire le Rapport annuel 2023 du SCF sur l'état des forêts du Canada.


Martin Fairbank a travaillé dans le domaine de la foresterie pendant 31 ans, y compris de nombreuses années pour un producteur de pâtes et papier et deux ans avec Ressources Naturelles Canada. Détenteur d'un PhD en chimie et d'une expérience en amélioration de procédés, développement de produits, gestion d'énergie et de production rentable, Martin est actuellement un conseiller indépendant basé à Montréal. Il est également écrivain et a publié récemment Resolute Roots qui relate les 200 ans d'histoire de la compagnie Produits forestiers Résolu et de ses prédécesseurs.

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